Il y a un livre que j’aime beaucoup. Il se termine par cette phrase : "il n’est jamais trop tard pour avoir une enfance heureuse".

Je n’avais que 20 ans quand je l’ai lu, et mon enfance avait été relativement heureuse. Mais j’ai tendance à prendre les choses écrites dans les livres très au sérieux. Pourquoi l’auteur avait-il choisi de finir un livre sur une histoire d’amour improbable avec cette phrase-là?

C’est à cette époque-là que j’ai commencé à voyager.

Quand on voyage, le temps se dilate. On est étonné par la quantité de choses qu’on peut faire dans un minimum de jours. L’expérience la plus simple paraît unique et majestueuse. Se réveiller dans un autre endroit est différent de se réveiller dans son propre lit. Même le goût du café est différent.

Maintenant, pensez à votre routine. Quand vous courez constamment contre la montre, quand les 24 heures de la journée ne suffisent pas pour faire tout ce qu’il y a à faire, et constater en fin de journée que vous n’avez fait rien d’exceptionnel et que la chanson de Rolling Stones "Time is on my side" n’était qu’un mensonge.

Il y a quelques années, j’ai commencé à suivre une formation en pédagogie du théâtre. Du coup, j’ai dû ôter le masque durci d’"adulte" de mon visage et réapprendre à jouer comme un enfant.

Quand les enfants jouent, on se rend vite compte qu’ils sont pleinement présents et engagés dans l’instant - physiquement et mentalement. Je me demande combien d’entre nous sommes capables de faire de même et à quelles occasions.

Quand les enfants jouent, ils se réjouissent de découvrir leur environnement. A leurs yeux, tout paraît nouveau et étonnant. Les adultes, par contre, marchent en regardant le sol, persuadés qu’il n’y a rien de nouveau à découvrir autour d’eux.

Quand les enfants jouent, ils ne réfléchissent pas trop. Ils sont pleinement dans l’action. Les règles ne sont pas là pour contrôler le jeu, mais pour le rendre plus amusant. Et si le jeu n’est plus amusant, ils changent les règles. Et le jeu continue. Quand les enfants jouent, le temps n’existe plus.

Les adultes ne sont pas du tout à l’aise avec le fait qu’ils ne peuvent pas tout contrôler -surtout le temps.

Sauf quand on voyage. Alors, on redécouvre l’enfant qui dort en nous et sa capacité innée à toujours observer le monde environnant avec un regard neuf et ravissement.

Voilà, je suppose, l’histoire qui raconte comment la phrase accrocheuse d’un auteur américain à succès et un programme de formation continue ont contribué à faire de moi la personne que je suis aujourd’hui.

Non, attendez.

La personne que j’aime être.